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Les soldes intermédiaires de gestion (SIG) sont des indicateurs financiers tirés du compte de résultat, comme la marge commerciale, la valeur ajoutée ou l’excédent brut d’exploitation (EBE). Ils décomposent pas à pas la formation du résultat net et offrent une lecture fine de la rentabilité opérationnelle d’une entreprise. Pourtant, ces indicateurs sont souvent sous-estimés lorsqu’il s’agit de piloter le poste client (les créances clients) et le recouvrement des factures. Beaucoup de dirigeants se concentrent sur le chiffre d’affaires et le résultat, sans voir que les SIG peuvent révéler des tensions cachées liées aux retards de paiement. Cette sous-estimation du poste client peut avoir des conséquences graves. Une entreprise peut être rentable sur le papier et dégager un bon résultat, mais manquer de trésorerie à cause de factures clients non réglées.
Dans cet article, nous allons voir comment les SIG servent de miroir de la performance et des tensions de trésorerie, comment ils éclairent la zone grise du poste client, et comment les utiliser pour piloter efficacement votre stratégie de recouvrement.
Les SIG, miroir de la performance… mais aussi des tensions de trésorerie
Les SIG reflètent la santé financière d’une entreprise à chaque étape de son activité. Parmi les principaux soldes intermédiaires, on trouve notamment :
- Marge commerciale : le profit brut réalisé sur la revente de marchandises (ventes de biens moins coût d’achat des biens vendus). Cet indicateur mesure la performance commerciale initiale.
- Valeur ajoutée (VA) : la richesse créée par l’entreprise après les achats externes. Elle indique la contribution effective de l’entreprise (ce qui reste pour payer les salaires, impôts, etc.).
- Excédent Brut d’Exploitation (EBE) : le résultat opérationnel avant amortissements et provisions. Il correspond à la capacité de l’entreprise à générer des ressources d’exploitation (avant investissements et financements).
- Résultat d’exploitation (REX) : le résultat opérationnel après amortissements et provisions d’exploitation, reflétant la performance économique courante de l’entreprise.
Ces soldes intermédiaires sont généralement analysés pour mesurer la rentabilité. Une marge commerciale élevée ou un EBE positif sont le signe d’une entreprise performante sur le papier. Cependant, un SIG en apparence satisfaisant peut masquer des tensions de trésorerie. Par exemple, un EBE confortable qui ne se traduit pas en trésorerie indique que les clients payent en retard. En effet, les retards de paiement n’affectent pas le chiffre d’affaires immédiatement, mais ils allongent le besoin en fonds de roulement : l’entreprise doit financer son cycle d’exploitation plus longtemps en attendant d’être payée. Concrètement, ce phénomène finit par se refléter dans le compte de résultat : des charges externes supplémentaires (frais de relance, affacturage) viennent réduire l’EBE, des charges financières en hausse (intérêts d’emprunts de trésorerie) détériorent le résultat courant, et des dotations aux provisions pour créances douteuses diminuent le résultat d’exploitation. Autant de signaux d’alerte dans les SIG qui trahissent un poste client mal maîtrisé.
Poste client : la zone grise que les SIG mettent (souvent) en lumière
Le poste client – c’est-à-dire l’ensemble des factures en attente de paiement – reste trop souvent une zone grise du pilotage d’entreprise. On suit de près les ventes enregistrées sans suivre avec la même rigueur leur encaissement effectif. Les SIG, grâce à leur lecture analytique du compte de résultat, peuvent justement mettre en lumière ces dérives du poste client.

Plusieurs signaux trahissent un allongement des délais de paiement. Le plus parlant est le DSO (Days Sales Outstanding), ou délai moyen de paiement client. Un DSO qui s’allonge signifie que les clients tardent de plus en plus à payer. Par exemple, passer de 60 à 90 jours de DSO signifie 30 jours de paiement en plus – soit environ 400 000 € de trésorerie immobilisée supplémentaire sur un CA annuel de 5 M€. Financer ce décalage par de la dette à 5% coûte plus de 20 000 € d’intérêts par an, ce qui réduit d’autant le profit. Cet exemple illustre le lien direct entre DSO, trésorerie et rentabilité : plus le DSO est élevé, plus le besoin en fonds de roulement augmente, ce qui pèse sur la trésorerie et in fine sur la performance (coûts de financement accrus, risque de créances perdues). D’autres voyants rouges dans les SIG confirment le diagnostic : si le résultat net baisse alors que le résultat d’exploitation reste stable, c’est peut-être à cause d’une envolée des charges financières pour financer le poste client ; de même, une hausse notable des provisions pour créances douteuses signale que des factures impayées commencent à peser lourd sur la profitabilité. Autrement dit, même avec un chiffre d’affaires et un EBE flatteurs, ces indicateurs d’alerte révèlent qu’un problème de recouvrement couve – invitant à réagir avant qu’il ne soit trop tard.
Piloter le recouvrement avec les SIG : une approche gagnante
Utiliser les SIG pour piloter le recouvrement est une approche gagnante, car elle relie directement les efforts de recouvrement aux résultats financiers de l’entreprise. Plutôt que de traiter le recouvrement comme un simple processus administratif, il faut l’intégrer au pilotage global en s’appuyant sur des données concrètes. Voici quelques conseils pratiques pour y parvenir :
- Intégrez les indicateurs du poste client dans vos tableaux de bord : Ne suivez pas seulement le chiffre d’affaires et le résultat. Ajoutez des indicateurs de recouvrement tels que le DSO ou le taux de factures échues impayées. En surveillant régulièrement ces indicateurs aux côtés de vos SIG, vous identifierez rapidement les écarts anormaux (par exemple une hausse du DSO corrélée à une baisse de trésorerie ou une montée des charges financières).
- Définissez des objectifs de recouvrement mesurables : Par exemple, visez une réduction du DSO de 10 jours sur l’année, ou maintenez le taux de factures impayées sous 5%. Des objectifs chiffrés permettent de quantifier l’impact attendu. Réduire le DSO de quelques jours libère de la trésorerie et améliore le résultat net en diminuant les intérêts payés.
- Anticipez et agissez dès les premiers signes : Utilisez vos SIG comme système d’alerte. Si votre marge d’exploitation baisse sans raison apparente, examinez immédiatement le poste client : une envolée des retards de paiement ou des frais de recouvrement imprévus en sont peut-être la cause. Enclenchez un plan d’action ciblé (relances, négociation de délais avec les clients concernés) avant que la situation ne se dégrade.
- Exploitez les outils et analyses prédictives : Un logiciel de recouvrement ou un module dédié dans votre ERP facilite le suivi en temps réel des indicateurs clés et la simulation de scénarios. Par exemple, simulez l’effet d’une réduction de 15 jours de votre DSO sur la trésorerie et sur vos résultats (baisse des intérêts débiteurs, etc.). Ce type d’outil permet de visualiser concrètement le lien entre vos efforts de recouvrement et l’amélioration de vos SIG.
Et si on arrêtait de séparer gestion et recouvrement ?
Dans beaucoup d’entreprises, le recouvrement est perçu comme une tâche à part, cantonnée au service comptable, tandis que le « pilotage » concerne surtout les ventes, la production ou les coûts. Cette séparation est artificielle et peut nuire à l’entreprise. Il est temps d’adopter une vision intégrée où le recouvrement fait pleinement partie du pilotage d’entreprise, au même titre que les achats ou la production.

Concrètement, cela signifie qu’une vente n’est plus considérée comme aboutie tant que la facture correspondante n’est pas encaissée. Les tableaux de bord de gestion devraient inclure des indicateurs de paiement client tout comme ils incluent des indicateurs de vente. De même, la performance des équipes devrait intégrer une dimension « cash » : par exemple, un directeur commercial pourrait être évalué non seulement sur le chiffre d’affaires qu’il génère, mais aussi sur le respect des délais de paiement de ses clients.
Cette intégration du recouvrement dans la gestion globale apporte de nombreux bénéfices. D’une part, elle installe une culture financière commune : chacun comprend que la trésorerie est l’affaire de tous, pas seulement du directeur financier. D’autre part, elle réduit les mauvaises surprises de trésorerie et renforce la résilience financière de l’entreprise. En anticipant mieux les problèmes de cash et en agissant en amont, on protège la rentabilité et la pérennité de la société.
Conclusion
Les soldes intermédiaires de gestion sont bien plus que de simples indicateurs de performance : ce sont de véritables alliés pour anticiper les problèmes de recouvrement et de trésorerie. Une marge ou un EBE flatteurs peuvent masquer des créances clients en souffrance ; à l’inverse, la dégradation de certains soldes (comme l’EBE ou le résultat net) est souvent le symptôme d’un poste client mal maîtrisé. Prendre en compte ces signaux permet aux dirigeants d’avoir une vision plus complète de la santé de leur entreprise.
Il est donc important de mieux exploiter les SIG dans la stratégie de recouvrement. Cela revient à accorder autant d’importance à l’encaissement qu’au chiffre d’affaires. C’est ce qui permet à une entreprise d’être non seulement rentable sur le papier, mais surtout réellement performante et pérenne, capable de transformer son chiffre d’affaires en trésorerie solide.
Pour vous aider à transformer les SIG en alliés, contactez Recouvéo.

Cédric Brun, Fondateur Associé Recouvéo
Expert Credit management, Cédric Brun a cofondé avec Lionel Rabayrol le groupe Recouvéo en 2013 pour aider les dirigeants et leurs services financiers (DAF, comptabilité, etc.) à optimiser leur stratégie. Il les assiste efficacement sur tout le processus recouvrement de créances et Credit Management.
Pour les accompagner, il s'appuie sur les nouvelles technologies, mais pas seulement. Sa maîtrise de l'expertise comptable, acquise pendant près de 8 ans au sein du cabinet Mazars, est un véritable atout pour obtenir des résultats.
"Avec Recouvéo, mon objectif est à la fois de générer de la trésorerie à très court terme, mais aussi de sécuriser leur activité durablement."